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Le cadre de travail est celui de l'apprentissage statistique de l'écrit qui est un type particulier d'apprentissage implicite pour lequel on considère que l'apprenant s'ajuste aux propriétés statistiques de son environnement linguistique grâce à des processus associatifs élémentaires. Sans effort cognitif et de façon non consciente, l'apprentissage statistique permet d'encoder les propriétés statistiques des unités linguistiques par simple exposition passive (nos lectures), de les auto-organiser en mémoire en respectant leurs distributions statistiques et, dans une tâche particulière, de les mobiliser en fonction de la mémoire de ces distributions. Ces propriétés statistiques renvoient, par exemple, à la répétition d'un événement indicée par la fréquence d'occurrence du mot dans des corpus d'écrits, à son incertitude indicée par la consistance orthographique d'une association graphème-phonème.
Pour étudier l'apprentissage statistique de l'écrit, le développement de bases de données lexicales joue un rôle majeur car elles permettent d'objectiver les propriétés distributionnelles des unités linguistiques. Dans cet objectif, après avoir développé les bases Manulex et Manulex-infra, le site d'interrogation en ligne eManulex a été développé afin de mettre ces outils à disposition des chercheurs (Lété et Ortega, 2010, 2012). Les bases Manulex sont également un outil de modélisation computationnelle de l'apprentissage de la lecture. Par exemple, dans la recherche ANR Apprentissage neuro-computationnel de la lecture (dir. J. Grainger, 2006-2009), l’apprentissage de la lecture a pu être modélisé grâce à un régime d’apprentissage réaliste reposant sur les statistiques distributionnelles des unités de l’écrit adressé à l’enfant dans les manuels de lecture (Dufau, Lété, Touzet, Glotin, Ziegler, & Grainger, 2010 ; Glotin, Warnier, Dandurand, Dufau, Lété, & Grainger, 2010). Enfin, un nouveau modèle d'apprentissage de la lecture décrivant la mise en place des deux voies impliquées dans le traitement du mot écrit (voie orthographique directe vs. voie phonologique indirecte) a été développé grâce à des mesures comportementales recueillies auprès d'une grosse cohorte d'enfants du CP au CM2 (Grainger, Lété, Bertrand, Dufau, & Ziegler, 2012 ; Ziegler, Bertrand, Lété, Grainger, 2013).
L’apprentissage statistique est optimal chez certains enfants mais moins efficaces chez, par exemple, des enfants souffrant de retard mental. C'est ce que nous avons montré dans la recherche ANR Diagnostic différentiel dynamique des apprentissages scolaires de l'élève handicapé (dir. B. Lété, 2007-2011) sur les apprentissages scolaires des élèves en situation de handicap dans laquelle le potentiel d’apprentissage d’élèves scolarisés en CLIS a été mesuré dans plusieurs tâches.
Parallèlement à ces programmes financés, d'autres recherches ont été menées sur le développement du traitement visuo-attentionnel (Ducrot, Pynte, Ghio, & Lété, 2013 ; Michael, Lété, & Ducrot, 2013) et du traitement de l'identité des lettres à la bonne position (Lété & Fayol, 2013). Enfin, une interprétation alternative de l'effet d'âge d'acquisition des mots a été proposée en termes d'un effet plus classique de fréquence cumulative en cohérence avec le cadre de travail de l'apprentissage statistique (Lété et Bonin, 2013).
En production de l'écrit, les bases Manulex sont exploitées pour extraire des prédicteurs des durées chronométriques obtenues pendant la composition d'un texte narratif (Maggio, Lété, Chenu, Jisa, & Fayol, 2012).
Cet axe de recherche a eu pour objet de poursuivre des travaux engagés depuis plusieurs années sur le rôle fonctionnel de la syllabe au cours de l’apprentissage de la lecture. Notre objectif était de préciser le statut de la syllabe et l’influence de ses caractéristiques linguistiques dans l’apprentissage normal et déficitaire de la lecture en recourant à différents paradigmes (détection de cibles, reconnaissance bi-modale de mots ou pseudo-mots, conjonctions illusoires). Plus précisément nous nous sommes centrés sur les "contraintes" qui pèsent sur l'accès et l'utilisation de la syllabe, contraintes propres au français (e.g., la fréquence et la complexité syllabiques, le décours temporel des codes phonologiques...), mais également plus "universelles" (e.g., la sonorité, les voyelles illusoires...). Outre une perspective développementale (Maïonchi-Pino, Ecalle, & Magnan, 2010 ; Maïonchi-Pino, de Cara, Ecalle, & Magnan, 2012a, nous nous sommes intéressés aux troubles phonologiques des enfants dyslexique (Maïonchi-Pino, de Cara, Ecalle, & Magnan, 2012b ; 2012c) et avons engagé une étude inter-langue franco-japonaise (Maïonchi-Pino, Yokoyama, Magnan, Takahashi, Hashizume, Ecalle, & Kawashima, 2013).
Partant du constat que les unités syllabiques peuvent être conçues comme unités intermédiaires et fondamentales, grâce auxquelles le processus d'identification de mots écrits devient plus efficace, nous avons prédit un effet positif d’un entraînement au traitement grapho-syllabique pour les enfants francophones faibles lecteurs. Pour tester cette prédiction nous avons élaboré et testé auprès de faibles lecteurs de CP et de CE1 l’efficacité d’un logiciel d'aide à l’identification de mot ciblé sur un traitement grapho-syllabique (Ecalle, Kleinz, & Magnan, 2013).
Ce travail a été réalisé en collaboration avec Norbert Maïonchi-Pino (LAPSCO-Clermont-Ferrant) qui a réalisé sa thèse dans l’équipe, Bruno de Cara (Université de Nice Sophia-Antipolis) Yasuyuki Taki, Satoru Yokoyama, Kei Takahashi., Hiroshi Hashizume et Ryuta Kawashima (Tohoku University, Sendai, Japan).
Deux composantes de la compréhension sont classiquement distinguées. La compréhension littérale qui correspond à l’élaboration d’une représentation propositionnelle de la situation décrite explicitement par le texte et la compréhension inférentielle. Deux types d’inférences ont été étudiées (Cain & Oakhill, 1999), celles nécessaires pour établir la cohérence entre des informations textuelles - les inférences dites de cohérence– et celles qui permettent de relier les informations textuelles aux connaissances préalables du lecteur – les inférences basées sur les connaissances (knowledge-based inferences). Notre objectif était d’établir des profils de lecteurs dans le but de proposer des entraînements à la compréhension ciblés. Nous avons mis en évidence des déficits spécifiques de compréhension en lecture, y compris , contrairement à ce qu’affirmaient (Cain & Oakhill, 1999) au niveau des informations littérales et ainsi pu établir des profils de faibles compreneurs (Potocki, Ecalle, & Magnan, 2013a) dans le but de proposer des entraînements ciblés. Dans cette perspective, nous avons conçu et testé auprès de faibles compreneurs de CE1 un logiciel d’aide à la compréhension conçu pour stimuler les différents aspects de la compréhension (Potocki, Ecalle, & Magnan, 2013b).
Ce projet visait à mettre en évidence l’efficience des informations tactilo-kinesthésiques extraites via les explorations sensorielles haptique ou graphomotrice sur l’intégration de la connaissance des lettres et le développement des habiletés en lecture et en écriture. L’objectif était 1/ d’établir le bénéfice d’une exploration séquentielle des lettres suivant les règles conventionnelles d'écriture sur l’acquisition du principe alphabétique, chez des enfants de 5 ans à risque de difficultés ultérieures en lecture-écriture, et 2/ de déterminer, parmi les entraînements où les lettres sont explorées dans le sens de l’écriture, quelle présentation tactilo-kinesthésique serait la plus efficace (haptique versus graphomoteur). Les résultats ont montré que le traitement graphomoteur semble plus adapté pour préparer les enfants à entrer dans l’apprentissage institutionnel de la lecture-écriture car il facilite l’élaboration et le maintien des connaissances notamment au cours des procédures d’exécutions des tracés (Labat, Ecalle, Magnan, 2010 ; Labat, Magnan, Ecalle, 2011 ; Labat, Ecalle, Baldy, & Magnan, 2014).
mise à jour le 27 décembre 2014